Vendée Globe histoire d’une course

Alors que 40 skippers prendront le départ de la dixième édition, ils étaient 13 à embarquer pour un premier saut dans l’inconnu, le 26 novembre 1989 : un tour du monde en solitaire, sans escale ni assistance. Découvrir l’article complet dans Les Sables d’Olonne Magazine Hors-série Vendée Globe.

Avant de devenir l’événement au rayonnement international que l’on surnommera l’Everest des mers, le Vendée Globe fut d’abord le pari fou de son créateur, le navigateur Philippe Jeantot. Plongeur sur plateformes pétrolières à ses premières heures, fasciné par l’idée d’un tour du monde en solitaire, il construit son voilier de 44 pieds et remporte le premier BOC Challenge, en 1983. Quelques années plus tard, entouré d’amis navigateurs, il imagine le Globe Challenge, rapidement renommé Vendée Globe. En 1989, l’idée paraît folle. « Combien vont revenir ? », entend-on régulièrement. Sur les 13 skippers engagés, ils seront sept à franchir la ligne d’arrivée, les autres concurrents ayant dû abandonner.

Un parcours éprouvant

Un départ des Sables d’Olonne au milieu de l’automne, les mers du Sud en plein été austral et un retour hivernal après avoir traversé les océans Atlantique, Indien et Pacifique. Inchangé au fil des éditions, le parcours totalise 45 000 km… en théorie. Pondéré par le vent, les vagues, la houle, les glaces et les changements de cap, on avoisine finalement les 52 000 km parcourus. Dès cette première édition, les eaux démontées des mers du Sud et le Golfe de Gascogne se montrent sans pitié avec les skippers. C’est Titouan Lamazou qui tire son épingle du jeu et rallie Les Sables d’Olonne en 109 jours.

30 ans d’innovation

Au fil des éditions, le temps de course diminue d’un tiers, le record étant établi lors du Vendée Globe 2016-2017 par Armel Le Cléac’h, en 74 jours : des performances rendues possibles par le travail réalisé sur les IMOCA, ces puissants monocoques de 60 pieds (18,28 mètres) pouvant atteindre les 40 nœuds en vitesse de pointe. Les révolutions sont plus rapides, tandis que les écarts se resserrent inexorablement : malgré la présence de 18 bizuths au départ, l’édition 2020-2021 compte le plus faible taux d’abandon (24 %) et le plus faible écart entre les premiers.

Un engouement croissant

On dénombre 200 concurrents sur les 9 premières éditions, dont 114 ont franchi la ligne d’arrivée. Pour répondre à l’engouement croissant des marins, le nombre de participants a été élargi à 40 skippers en 2024. Pour se qualifier, chaque binôme skipper-bateau doit avoir pris le départ d’au moins deux courses qualificatives sur la période 2022-2024, parmi lesquelles la Vendée Arctique – Les Sables d’Olonne, la Route du Rhum, le Retour à la base, la Transat CIC et la New York Vendée – Les Sables d’Olonne. Le temps réalisé par le skipper sur l’une de ces courses ne doit pas être plus d’une fois et demi supérieur au temps du vainqueur.

Un règlement sans équivoque

Le règlement de la course répond aux principes mêmes de l’événement : un tour du monde en solitaire, sans escale ni assistance. Ainsi, personne d’autre que le skipper ne peut se trouver à bord du bateau, à l’exception d’un sauvetage. La seule escale technique autorisée est un retour aux Sables d’Olonne, dans un délai de 10 jours après le départ. Le skipper ne peut ensuite compter que sur lui-même. Il doit imaginer sa navigation (il lui est interdit de recevoir un routage de la terre), il répare lui-même les avaries… et se soigne seul en cas de blessure.

Un succès populaire

Plus de deux Français sur trois ont suivi la dernière édition, dont un million de fans sur les réseaux sociaux et de joueurs sur Virtual Regatta. Dans le village de 30 000 m2 on compte désormais plus de 2 millions de visiteurs, encadrés par 3 350 bénévoles. Suivi jusque dans les écoles, l’événement est devenu l’étendard d’un Département et d’une ville, mais aussi l’illustration d’une mentalité : celle des gens de mer qui bravent les éléments pour nous protéger, nous nourrir ou nous emmener glisser avec eux le long des océans… Symbole de cet engouement, la descente du chenal, dans l’une des plus belles baies du monde et sous le regard de milliers de passionnés, reste un moment marquant à chaque édition.

Un événement « eau féminin »

Si les deux premières éditions ne comptaient que des participants masculins, l’événement n’a pas tardé à se conjuguer au féminin. En 1996-1997, Catherine Chabaud devient la première femme à boucler un Vendée Globe. Quatre ans plus tard, la Britannique Ellen MacArthur, 24 ans, se classe deuxième. Six femmes prendront le départ en 2024, égalant ainsi le record de l’édition précédente.

Des partenaires rayonnants

Au départ du dernier Vendée Globe, plus de 130 entreprises et collectivités soutenaient les 33 skippers. Un soutien financier, logistique et moral qui ne faiblit pas en 2024 ; pour ces partenaires et fournisseurs officiels, l’événement représente une opportunité incomparable de gagner en exposition, à l’image de l’entreprise française Sodebo, qui estime que sa notoriété a été multipliée par 12 depuis que son nom est accolé à l’événement !

De Titouan à Yannick

Avant de devenir le précurseur, celui qui a inspiré d’autres à naviguer dans son sillon, Titouan Lamazou, le Béarnais, est lui-même inspiré par Éric Tabarly, qu’il côtoie lorsqu’il a 20 ans à bord de Pen Duick VI. Pour la première édition de 1989, aux commandes de son Écureuil d’Aquitaine II flambant neuf, Titouan Lamazou prend les devants au troisième jour de course, talonné par Philippe Poupon jusqu’à ce que ce dernier déclenche ses balises de détresse peu après Noël. Le 16 mars 1990, il franchit la ligne d’arrivée peu après minuit. C’est la victoire d’un sportif mais aussi d’un artiste, passé par les Beaux-Arts, à qui la mer inspirera œuvres littéraires et dessins.

Né en 1972 à La Rochelle, Yannick Bestaven est quant à lui ingénieur de formation – en plus d’être un fervent supporter du Stade Rochelais. Coconcepteur de l’hydro-générateur qui équipe la plupart des bateaux de course, Yannick se forme aux rudiments du nautisme sur le bassin d’Arcachon. Après sa victoire sur la Mini Transat 2001, il passe au circuit IMOCA en 2008, jusqu’à remporter le dernier Vendée Globe…

Des histoires inoubliables

Loïc Peyron qui porte secours à Philippe Poupon en 89, Yves Parlier qui répare seul son bateau en 2000, Yann Eliès qui se fracture bassin et fémur en 2008, sans oublier Bertrand de Broc qui se recoud la langue ou encore Jean Le Cam qui chavire au large du Cap Horn avant d’être secouru par Vincent Riou…
Le Vendée Globe constitue un recueil d’histoires insolites, témoignages de l’abnégation des skippers et de la solidarité qui les anime. Des élans de solidarité qui dépassent le cadre de leur pratique sportive : à chaque édition, les skippers mettent leur tour du monde au service de causes qui leur sont chères (actions sociales, protection de l’environnement, recherche médicale…).

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